L‘ordre des frères mineurs capucins voit le jour en 1525 dans les marches d’Ancone, inspiré par le climat de réforme qui se faisait jour dans l’ordre franciscain en cette période précédant le Concile de Trente. Dès 1540 le père Mariano di Nebbio, implanta en Corse la réforme naissante, en compagnie du frère Pierre de Santa Lucia di Mercurio. En moins de dix ans les capucins, outre Bastia, fondèrent 5 couvents : Belgodere, Luri, Santo Pietro di Tenda, Vescovato et Pozzo Brando.
A quoi ressemblait-il, notre couvent, au moment de sa fondation ? Selon les normes en vigueur dans le nouvel ordre, l’église devait être de dimensions modestes, (10 mètres de long sur 4 à 5 de large), avec une seule nef et un seul autel. Le choeur, situé derrière l’autel, avait la forme d’un carré de 4 m de coté. Les cellules étaient de 2,50 m le long, de large ainsi que de haut, avec de petites fenêtres. Tout ceci de plain-pied. Pas d’étage. La pauvreté de Saint François.
Au couvent de Bastia, en 1600, l’église est agrandie et dotée de trois chapelles latérales du coté droit. Le couvent est surélevé, et en 1650 il compte 41 cellules où vivent 9 pères, 3 clercs et 14 frères laïcs, sans compter les nombreux religieux qui s’y rassemblent lors de la tenue des chapitres, le couvent de Bastia étant la résidence du Provincial.
Les couvents vivaient en autarcie, ainsi à Bastia, le couvent sert aussi d’hôpital et de pharmacie, il y avait un frère « speziale », qui connaissait les plantes médicinales, et des frères infirmiers. Le couvent possédait aussi un atelier de fabrication de drap où travaillaient quatre tisserands, les frères « lainiers ». Certains frères étaient également tailleurs. Il y avait aussi des frères maçons, qui s’occupaient de l’entretien du couvent. Pour les gros travaux, ils faisaient appel à des corps de métiers, ainsi pour la construction du clocher en 1684. Les frères étaient également horlogers, et certains étaient passé mîatres de l’art de l’horlogerie. Les couvents capucins étaient pratiquement tous ornés de cadrans solaires. D’autres étaient menuisiers, ébénistes, certains étaient de véritables artistes, ainsi le frère Vittorio Fazio de Bastia, à qui on a décerné le titre de « maestro dei tabernacoli ». C’est à lui que l’on doit le magnifique tabernacle du Maître Autel. Il y avait également bien sur des frères quêteurs et aumoniers des prisons. La population les aimait beaucoup et les soutenait matériellement.
La Corse, étant devenue française, allait en subir les terribles conséquences.
2 novembre 1789 : confiscation des biens du clergé. Le 25 février 1792, un décret du Directoire Départemental supprime le couvent Saint Antoine, les biens des religieux sont mis sous scellés, beaucoup de frères s’expatrient en Italie.
Pendant le royaume Anglo-Corse, jusqu’en 1796 , à la demande de Pascal Paoli, les couvents sont réouverts. Saint Antoine compte alors six religieux
Après la défaite de Napoléon III en 1870, l’anticléricalisme fait son retour avec les décrets contre les congrégations. Or quand la force publique veut expulser les capucins, la population de Bastia est si menaçante que le préfet obtient un sursis
En 1901, c’est la loi contre les congrégations ; en 1903, le 5 mai, a lieu l’expulsion des pères.
En 1920, retour des religieux, la province ayant été reconstituée par le père Guillaume de Speloncato, après les quatre ans de guerre mais malgré tous les efforts et leur zèle apostolique, la Province capucine ne se relèvera plus.
En 1939 elle sera annexée à celle de Lyon, qui a son tour cèdera sa place à la province de Sardaigne en 1984.
“Et après que le Seigneur m’eut donné des frères, personne ne me montrait ce que je devais faire, mais le Très Haut lui-même me montra que je devais vivre selon la forme du Saint Évangile”
(Testament de Saint François d’Assise, 14).